Vous voilà sur la Nef de la Pleureuse et du Fou, entre époques et continents... |
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| Shit. Just wanted to be alone [Kuro] | |
| | Auteur | Message |
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Nephtys
Messages : 71 Date d'inscription : 05/07/2010 Age : 31 Sexe du Personnage : F Profession : Cobaye
La vie d'avant... Date de Naissance: 4 avril 2047 Âge du Personnage: 24 ans Lieu de Naissance: USA
| Sujet: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Sam 28 Aoû - 1:04 | |
| Le silence. Quand on ferme les yeux et qu'on ne se concentre pas, on n'entend rien. On se sent flotter dans le néant; on aurait presque l'impression d'être mort. Cette impression un peu étrange; comme si l'on dormait éveillé, qu'on n'était là sans l'être, qu'on était juste autre part. Qu'est-ce que c'était, la mort, de toute manière? Rien du tout, une absence peut-être; un vide que l'on ne pourrait combler. Un vide incommensurable que personne ne parvient à cerner, car il est implacable. Ce serait comme un grand tunnel sans fond, quelque chose que l'on pourrait presque palper, parfois. On avait déjà vu des personnes revenir du coma en chuchotant qu'elles avaient vu des choses incroyables, qu'elles n'auraient pu imaginer sans s'approcher autant de la mort. Mais cette mort, qu'on leur refusait, ici, sur la Nef, cette mort, était-elle vraiment mieux que la vie? Était-ce mieux d'être enfermé ici, ou bien d'aspirer au repos éternel? Valait-il mieux souffrir en silence dans cette prison dont personne n'osait sortir, ou bien endurer le repos infini? Il n'y a pas d'âme; il n''y a pas de renaissance; il n'y a pas de réincarnation. Il n'y a rien après le dernier souffle. Seulement, peut-être, un dernier voyage dans ses souvenirs, à sa dernière seconde sur Terre. Si l'on devait mourir, de quoi se rappellerait-on en dernier? D'un visage aimé, d'un souvenir heureux, d'un endroit enchanteur, d'un objet cher, d'une réussite?
Nephtys n'avait rien de tout cela. Elle avait grandi dans la froideur du silence implacable de ses supérieurs. On lui avait refusé la chaleur humaine, on lui avait refusé le luxe du choix. Choisir sa vie, choisir ses mœurs. On l'avait emmurée dans sa solitude afin de tirer un maximum parti de ses compétences hors du commun; et peut-être aussi pour la rendre plus docile. Car en étant docile, on s'en fait moins. On ne songe pas spécialement à la peur, à la douleur ou même à la mort. Et Nephtys, pauvre cobaye, pauvre cadavre ambulant qui n'avait jamais vécu, avait-elle pensé à quelque chose quand elle avait vu le canon du pistolet se tourner vers elle? Avait-elle eu des regrets, de l'angoisse, s'était-elle demandé si elle n'avait pas manqué quelque chose? On ne le saurait sûrement pas. Il lui semble avoir vu des yeux. Des yeux pâles, dont on ne pouvait déterminer exactement la couleur. Mais s'agissait-il de ses yeux à elle? Elle ne retirait son casque que quand il y avait suffisamment peu de lumière. Elle ne se rappelait pas avoir un jour désiré croiser son propre regard. Alors, à qui appartenaient ces yeux, ces simples yeux, au regard neutre et passif? Ceux de son créateur? Ce scientifique, qui avait été la seule personne au monde à lui offrir un peu de chaleur humaine. Mais ça, Nephtys ne le réalisait pas. Nephtys s'était enfermé le cœur à double tour et ne raisonnait qu'avec ses réflexions. Tout devait être fait de sang-froid, et de manière neutre. Nephtys ne croyait pas à la notion de bien ou de mal. Si cette notion existait vraiment, elle l'aurait, elle aussi.
Mais peut-être le monde avait-il tourné sans elle. Peut-être était-elle la seule au monde à ne penser qu'à ses résultats, et non aux actes en eux-mêmes. Qu'est-ce qu'une larme, quand on n'a pas eu d'enfance? Qu'est ce qu'un soupir, lorsqu'on n'a pas de regret? Qu'est-ce qu'un baiser, si l'on ne connaît rien aux sentiments? Ce ne sont que des notions vides de sens pour des personnes comme elle; des personnes seules qui ont accepté de l'être, car on ne leur a pas proposé autre chose. Un peu comme si, par extension, elle était déjà morte. Car en vérité, elle n'a pas vécu. Tu n'as pas vécu, hein Nephtys? Tu n'as pas appris à apprécier la douceur d'un pétale de fleur ou l'odeur du miel dans les bois. Tu n'as pas cherché à comprendre le sentiment humain que ton créateur a voulu t'inculquer, autant qu'il le pouvait, avant d'être écarté par l'armée. Tu ne l'as pas connu, car tu étais tant enfermée dans le cocon de l'impassibilité que tu es passée devant toutes les joies et toutes les peines sans pouvoir les différencier. Tu as été garde du corps lors d'un mariage, tu n'as ressenti aucun bonheur. Tu as été témoin d'un viol d'une des autres poupées soldats, tu n'as pas connu le dégout. Non, tu as juste été une spectatrice de toute la merde et de toutes les joies du monde; tu n'as pas pu les effleurer. Alors comment comprendrais-tu les notions d'amitié, d'amour, de reconnaissance? Comment ferais-tu la différence entre quelqu'un qui cherche à te berner et quelqu'un qui t'aime vraiment? Tu ne pourrais pas, non. Même quelqu'un de plus humain que toi ne le pourrait pas. Car des êtres plus manipulateurs que toi, il en existe des tas.
De toute façon tu n'es pas manipulatrice. Tu es tacticienne; tu sais quand frapper, tu sais où mettre les mots justes pour mettre à bas ton adversaire. Mais tu ne comprends pas le principe de la manipulation et du chantage. Tu ne vois pas pourquoi tu devrais faire croire à un ennemi que tu es de son côté pour mieux le prendre en traître. Finalement, pauvre petite Nephtys, tu es très loyale, très attachée à des principes que tu ne saurais énoncer, mais qui sont encrés si profondément en toi qu'il serait impossible de te les arracher. Sauf qu'actuellement, tu n'utilises plus ces principes car tu n'as personne à qui être loyale. Tu te souviens? A ta dernière heure, tu as accepté de baisser ton arme devant un général qui t'avais éduquée. Il en a profité pour te tirer dessus. Tu étais alors naïve. Tu ne comprenais pas le dédale de pensées menant un homme à la trahison ou au mensonge. Mais maintenant que tu y réfléchis plus, tu commences à comprendre. Comprendre que de toute manière le monde dans lequel tu es née était pourri, rien que par le fait qu'il ne t'as pas laissé une chance pour vivre comme n'importe quel être humain. Car avant d'être un cobaye, tu était une femme, une femme de chair; créée artificiellement, ayant subi une fausse gestation, mais finalement, tu étais humaine. Et on a fait de toi et de tes successeurs des robots. De simples robots idiots.
Nephtys serra les poings. Pourquoi s'enfoncer dans des monologues aussi stupides qui n'apportaient aucune réponse? Elle n'avait pas besoin de réponse; elle savait qui elle était, et c'était suffisant. Elle pouvait ne pas connaître les autres en profondeur, elle pouvait ne pas savoir pourquoi elle était là, qu'importe, elle était là, et ça suffisait. Sa jointure devint blanche. Elle desserra la pression le long de son bras, et regarda le plafond. Depuis combien de temps était-elle sur son lit, à réfléchir? S'était-elle assoupi? Quand était-elle venue? Elle ressentit de la faim. Sa main partit à l'aveuglette sur sa table de nuit, à chercher le petit tiroir. Elle l'ouvrit, et trouva à tâtons de quoi se rassasier pour le moment: une pomme. Elle aimait bien les pommes; c'était nourrissant, et elle les mangeait souvent en entières car la peau et les pépins des pommes étaient remplis de nutriments et vitamines que la chair ne contenait pas. Elle la porta à sa bouche, et la termina en moins de deux minutes. Sa combinaison nettoya automatiquement ses mains, qu'elle porta à son visage. Son casque. Où était son casque? Repartant à l'aveuglette sur sa table de nuit, elle sentit l'objet posé sur le bois humide. Bon. Elle était dans le noir, elle ne risquait pas de se faire bien mal. Elle soupira, se retourna une ou deux fois, puis soudain se crispa. Elle avait entendu un bruit. Comment? Quand? Mais ses réflexes furent plus rapides que ses questionnements. Même dans le noir complet, son corps élancé et souple se mût vers l'intrus, et le tint fermement par le cou en le collant contre le mur. La forme de ce cou, la façon de se retenir avec une légère frappe sur le mur propre aux arts martiaux, ces mèches longues qui fouettaient le bas de ses joues et jouaient sur la main de la cobaye, ce souffle impassible...
"Je t'ai reconnu, Kurogane. Quand es-tu rentré? Comment? Je pensais avoir fermé à clef. Tu as intérêt à avoir une bonne raison." | |
| | | Kurogane
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Dim 29 Aoû - 1:29 | |
| You’re something beautiful, a contradiction I wanna play the game, I want the friction You will be the death of me.
Time is Running Out – Muse. Lentement, Kurogane ouvrit ses lourdes paupières. Enveloppé dans sa couverture des pieds à la tête, l’adolescent bailla sans retenue, puis dégagea son visage pour avoir de l’air frais. Il leva les yeux vers l’écran de télévision qui brillait devant lui ; il avait encore oublié de l’éteindre avant de s’endormir, ce pourquoi il s’était réfugié sous sa couette. La lumière, son ennemie mortelle, n’avait pas remporté le combat, cette fois-ci. Il faut dire que la première chose qu’il avait fait en arrivant dans cette chambre, c’était en fermer les rideaux. Il n’y avait rien qu’il détestait plus que d’être réveillé par un rayon de soleil vengeur lorsqu’il dormait tranquillement. Encore étourdi par le sommeil, ou du moins son illusion, dans un élan de courage, il s’étira, posa les pieds par terre, et se leva. Marchant pieds nus sur le parquet dont il ne ressentait plus le froid, il se dirigea vers l’écran de télévision, et l’éteignit, avec le lecteur dvd ; Edward aux mains d’argent allait l’attendre encore quelques heures. Puis, il alluma sa lampe de bureau, sa lumière étant plutôt douce, et ouvrit son placard pour y dénicher ses vêtements « du jour ». Malgré ce temps qui refusait de s’écouler et la nuit qui ne tombait jamais, l’adolescent essayait vainement de se créer des journées, histoire de ne pas devenir complètement fou. La nuit, sa chère amie, lui manquait tellement qu’il laissait toujours sa chambre remplie de ténèbres. Il songea de nouveau, avec regret, en enfilant son jean noir, qu’il ne reverrait plus jamais la lune ni les étoiles… Cette pensée lui arracha un soupir. Enfin, étant donné le peu de temps qu’il avait dû dormir, ce n’était pas une nuit qu’il venait de faire, mais une sieste. Ca ne servait à rien de dormir, dans ce monde, de toute façon. Mais Kurogane, de son vivant, aimait trop se laisser emporter insouciamment dans les bras de Morphée, pour pouvoir perdre cette fâcheuse habitude sur la nef. Le sommeil était la seule chose qui avait le pouvoir de lui faire oublier tous ses soucis et de l’apaiser un tant soi peu. A forces de recherches, il finit par dénicher un marcel noir au fin fond des entrailles du placard, et l’enfila, ainsi qu’un bracelet de cuir, et son collier cadenas qu’il aimait tant ; puis, il prit son zippo et un paquet de cigarettes sur son bureau qu’il rangea dans sa poche, et sortit de sa chambre, toujours de mauvaise humeur. Il n’avait jamais été un cadeau, au réveil. Il fonça aux cuisines, et se servit un café noir, histoire de se réveiller. Son esprit devait être vraiment convaincu de la chose pour que cela fasse effet…
Tandis qu’il savourait le breuvage amer, il repensait à Nephtys. Le premier visage qu’il avait vu, en arrivant sur la Nef, et celle qui l’avait le plus intrigué, parmi les passagers. Peut-être parce qu’elle était née pour tuer, comme lui. Ou peut-être parce qu’il était curieux de savoir ce qui pouvait bien se cacher derrière cet étrange masque, et cette épaisse carapace de glace dont elle semblait recouverte. Son jeu, avec elle, serait de réussir à lui faire ressentir quelque chose. Il l’avait décidé à peine quelques minutes après l’avoir rencontrée. Même si la tâche n’était pas aisée, il sentait que l’expérience pourrait être intéressante. Et puis… Elle avait quelque chose de plus que les autres n’avaient pas, qui lui donnait envie de s’en rapprocher. Quelque chose qui le titillait, mais il ne pouvait pas dénicher ce que c’était. Même s’il ne s’agissait pas de ça, bien sûr, il la désirait. Avec le corps qu’elle avait, connaissant l’adolescent, depuis la première fois qu’il l’avait vue, il avait fait de nombreuses tentatives pour la mettre dans son lit. Malheureusement pour lui, Nephtys semblait être insensible à ce genre de pulsions humaines. Pire encore, elle semblait presque les mépriser. Dépité, Kurogane en était donc réduit à l’admirer de loin sans rien pouvoir faire. Au moins, elle acceptait de se battre avec lui, c’était déjà ça. Un adversaire de taille, d’ailleurs. Ce n’était pas tout les jours qu’il en trouvait, surtout lorsqu’il était à Tokyo. C’était donc toujours ça de gagné. A ce propos. Qu’est-ce qu’elle pouvait bien faire, en ce moment même ? Pourquoi ne pas aller la voir, et tuer un peu le temps avec elle ? Elle ne devait pas beaucoup s’amuser, toute seule, de toute façon, même si elle semblait être quelqu’un d’assez solitaire. D’une traite, Kurogane finit son café et se leva. Attrapant un petit pain au passage, qu’il enfourna dans sa bouche, il quitta les cuisines.
Avant de se diriger vers l’appartement de Nepthys, Kurogane fit un détour par sa propre cabine. En partant, il avait oublié un tout petit détail. Nephtys, lorsqu’elle était dans sa chambre, fermait toujours à clef. Sûrement pour ne pas qu’on la dérange. Plusieurs fois, alors qu’il allait lui rendre visite, cette saleté de porte verouillée s’était trouvée sur son passage. Plus pour longtemps. Ce n’était pas à l’assassin le plus discret de Tokyo qu’elle allait faire le coup. Kurogane songea, en ricanant, qu’il avait peut-être été un ninja dans une autre vie. Il se saisit d’un fil de fer et d’une carte bleue qu’il avait trouvés dans le bric-à-brac du bateau pour ce genre d’occasion, et partit saboter la vilaine serrure. Il en profita pour prendre, tant qu’il y était, son recueil de Baudelaire dans sa bibliothèque. Cela faisait longtemps qu’il songeait à le lui faire découvrir ; il avait même pris soin de chercher un poème qui lui parlerait, pour l’occasion. Aussi insensible qu’elle était, peut-être que la poésie, elle, saurait l’émouvoir. Une fois devant la pièce, Kurogane posa délicatement son oreille sur la porte. Aucun bruit. Elle devait probablement se reposer. Il tourna tout doucement la poignée de la porte. Elle était bien fermée à clef. Mais plus pour longtemps. Quelques secondes plus tard, il était dans la chambre, tout aussi noire que la sienne, dont il referma la porte sur son passage. Le malheureux eût-il à peine le temps de pénétrer dans la pièce que son habitante se jeta sur lui pour le clouer au mur. Le yakuza, un large sourire aux lèvres, se laissa faire, prenant soin de garder un appui sur le mur, au cas où. Il avait l’habitude, avec elle. Placide, il contempla un instant ce si joli visage qui lui faisait face. Quelle chance. Elle ne portait pas son masque, aujourd’hui. Kurogane plongea son regard rouge amusé dans les prunelles de glace de son amie. Même pour ses yeux d’assassins entraînés, il faisait trop sombre pour pouvoir nettement distinguer leur couleur ; cependant, il pouvait voir que les yeux de Nephtys étaient clairs, sûrement d’un très beau gris pâle. Dire qu’il ne pourrait jamais voir leur couleur à la lumière. Il rétorqua, ce même sourire insolent aux lèvres :
« Toujours aussi aimable, hein ? Moi aussi, je suis heureux de te revoir. Mais il faudra que tu songes à traiter tes amis plus gentiment, à l’avenir. Même si tu ne connais pas encore la signification de ce mot… »
Il ricana, puis reprit, voyant qu’elle ne réagissait pas :
« Je viens de me réveiller, et je m’ennuyais, alors je me suis dit que j’allais te rendre une petite visite. Ce méchant verrou m’énervait, alors cette fois-ci, je l’ai cassé pour rentrer. Tu ne m’en veux pas, hein ? »
Dans le noir, il fit une moue innocente ; puis, lorsqu’il se fut lassé de jouer, il lança, d’un ton plus ferme :
« Tu commences à me faire un peu mal, là, Nepthys. J’aimerais bien que tu me lâches. J’en ai tué pour moins que ça, tu sais… »
Elle était très forte, certes ; et, il devait l’avouer, elle était même plus forte que lui. Mais ce n’était pas une raison pour qu’elle le sous-estime de la sorte. Une fois qu’elle l’eût lâché, Kurogane massa un instant sa nuque pour faire disparaître la douleur, puis alla s’asseoir sur le lit de la jeune femme.
« Je t’ai apporté un recueil de poèmes que j’aime beaucoup. Tu connais peut-être. Puis-je t’en lire un extrait ? Tu me diras si tu en as deviné l’auteur. »
Sur ce, il ouvrit les Fleurs du Mal, à la page qu’il avait retenue pour l’occasion, et commença à déclamer les vers inscrits sur le papier ancien, jauni par le temps :
« Ils marchent devant moi, ces Yeux pleins de lumières, Qu’un Ange très savant a sans doute aimantés ; Ils marchent, ces divins frères, qui sont mes frères, Secouant dans mes yeux leurs feux diamantés. »
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| | | Nephtys
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Mar 31 Aoû - 16:14 | |
| Il la regarda dans les yeux; et ce fut alors que Nephtys réalisa qu'elle avait omis de remettre son masque. Un frisson la parcourut. La voyait-il dans l'obscurité? Pouvait-il voir ses yeux? Ses yeux, ces étrangers qu'elle-même ne connaissait pas? Pouvait-il voir leur couleur, leur forme, leur regard? Non, non, ce n'était pas possible... Mais Kurogane était un assassin entraîné, et il devait avoir souvent combattu dans le noir. Et suffisamment pour mieux voir dans la pénombre que le commun des mortels. Nephtys ne sut pas quoi faire. Le silence lui devenait pesant, et les secondes que le jeune homme passait à la fixer lui semblait une éternité. Si ça se trouve, cela faisait à peine dix secondes qu'elle l'avait plaqué contre le mur. Mais elle ne pouvait plus bouger; elle attendait juste, le souffle court, qu'il lui réponde. Sa main se crispa autour du cou du garçon. Puis, il finit par lâcher quelques mots. Amis? Amis. Pff.
"Non, je n'ai pas d'amis, surtout pas parmi des imbéciles comme vous... Et sinon, j'allais bien, avant que tu ne rentres."cracha-t-elle. Mais Kurogane semblait d'humeur bavarde. Quoi? Il avait osé casser son verrou? Comment allait-elle faire pour s'enfermer maintenant? Il allait falloir qu'elle le répare, qu'elle le solidifie, puisqu'à présent il savait comment rentrer. Elle serra les dents.
"Si, je t'en veux. Mais de toute manière, tu es entré maintenant, n'est-ce pas."
Elle le lâcha quand il le lui demanda plus fermement. Nephtys, qui avait côtoyé et même tué de nombreux assassins, savait quand les plaisanteries s'arrêtaient de leur côté. Et le ton de Kurogane ne trompait pas. Il voulait qu'elle le lâche; immédiatement. Ne voulant pas d'effusion de sang dans sa chambre, la cobaye s'exécuta; à contrecœur. Elle était certaine que le jeune homme allait profiter autant qu'il le pourrait de cette fleur qu'elle lui faisait. Et elle ne se trompait pas. Il alla tranquillement prendre place sur son lit. Elle siffla entre ses dents.
"C'est mon lit, ça. Ah, mais suis-je bête, tu n'as pas autre part où t'assoir, vu que je n'ai pas installé de chaise dans la chambre."
Puis Kurogane eut la lubie étrange de lui lire un poème. Nephtys haussa les épaules, et écouta attentivement la strophe qu'il commença à lui lire. Gracieusement, elle le laissa terminer le poème, puis souffla, à mi-voix:
"Il s'agit du Flambeau Vivant, dans le recueil des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire."
Elle avait prononcé tous les titres en français, mais un des pouvoirs étranges de la Nef était que l'on pouvait comprendre toutes les langues sans pouvoir, par contre, en parler un seul mot. Nephtys avait appris le français lors de sa vraie vie, mais Kurogane avait pu aisément comprendre ce qu'elle venait de dire.
"Par contre, il me semble que tu ne l'as pas lu en français. La version que tu as lue... C'était du japonais? Ça sonnait pas mal; mais c'est mieux en français. Je dois avoir le recueil quelque part..."
Joignant le geste à la parole, elle alla ouvrir sa grande armoire; un ou deux livres lui tombèrent dessus. Elle grogna. Il allait falloir faire du ménage. A tâtons, elle chercha le recueil de poèmes; elle avait en sa possession une des premières éditions, illustrée magnifiquement et très bien reliée, que le temps avait miraculeusement conservé. Elle l'avait trouvé dans le débarras de la Nef; et était très contente de sa découverte. Elle donna le précieux volume au jeune japonais, en prenant soin de ne pas le toucher. Mais alors qu'il lui prenait le livre des mains, elle eut un moment de stupeur.
"Attends, ce poème... Tu ne l'as pas choisi impunément, n'est-ce pas? Tu avais un but, un but précis!"
Elle se mût rapidement vers sa table de nuit et s'empressa de remettre son casque. La vision infrarouge s'enclencha, et elle put voir le jeune homme sur son lit. Elle n'osa pas regarder s'il souriait.
"Ce sont mes yeux! MES yeux! Personne, personne n'a le droit de les voir! Moi-même je ne peux pas! Comment peux-tu oser m'arracher la seule chose que je ne sais pas de moi, et que je ne saurai jamais?? J'en suis sûre, j'en suis certaine... Les avais-tu déjà vus avant, mes yeux? Non, non, il n'y a pas eu d'autre occasion... Et pourquoi m'avoir lu ce poème alors? Tu savais qu'en entrant je n'aurais pas mon casque? Et puis, cette fameuse excuse de 'je suis venu car je suis ton ami', ça ne marche pas! Qu'est-ce que tu voulais? Réponds! Réponds!!!"
La cobaye avait perdu tout sang-froid. Une peur indicible, qu'elle n'avait jamais connu, l'envahit. Chez elle, son regard avait toujours été un grand tabou. Elle n'en parlait à personne, et personne ne lui en parlait. Tout le monde survivait, tout le monde était content. Mais là, ce jeune assassin arrive chez elle, la fixe, voit son visage entier, et en plus lui lit des poèmes! Parlant de ses yeux! Elle ne pouvait pas se calmer. Elle pourtant toujours si calme, si prévoyante quant à ses actions, elle qui ne bronchait jamais, elle n'arrivait pas à se calmer quant à ses yeux, ses yeux qu'elle ne retrouverait jamais. Si Kurogane avait vu ses yeux, que pouvait-il faire maintenant? Et comment réagirait-il face à cette Nephtys si différente que d'habitude? Elle serra les poings; elle eut envie, terriblement envie de le frapper. Elle glissa jusqu'à lui et leva le poing.
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| | | Kurogane
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Ven 3 Sep - 1:38 | |
| It’s too late now to stop the process
This was your choice – you let it in
This double life you live is eating you up from within
A thousand shards of glass you pushed beneath my skin
And left me lying here to bleed
« Broken Pieces », Apocalyptica. Tandis que Kuro déclamait, avec passion, les vers du grand poète, transperçant le silence la pièce, il relevait parfois son regard vers Nephtys, pour voir si elle l’écoutait. Alors, fier de voir qu’elle lui prêtait attention, un long sourire s’étirait sur son visage, et il poursuivait sa lecture. C’est avec une grande surprise, qui le cloua presque au matelas, qu’il l’entendit lui jeter à la figure le nom du poème et de son auteur sans la moindre difficulté. Une déception cruelle l’envahit. Lui qui avait cru lui apprendre quelque chose, pour une fois. Cette fille était vraiment un puits de culture. Même lui qui avait reçu le savoir de nombreux professeurs particuliers ne lui arrivait pas à la cheville. Quelque chose, dans sa poitrine, le pinça. Comme si son cœur se serrait. C’était son orgueil qui en prenait un coup.
« Je vois. Tu connaissais déjà Baudelaire… » Dit-il simplement, détournant son regard vers le fond de la pièce, affichant clairement sa déception.
A ces mots, il ferma son recueil d’un coup sec, et se laissa choir sur le matelas de Nephtys.
« J’aime énormément ce poète. Tout ce qu’il écrit est si… chaotique. » Poursuivit-il, l’air songeur.
Il n’y avait que Baudelaire qui savait décrire le mal-être constant qui l’habitait ; il n’y avait que lui dont le monde, sombre, cruel, mais si fascinant se rapprochait autant du sien. La déception ne se fit que plus forte, lorsqu’elle se mit à comparer les différentes versions. Certes, l’œuvre était toujours plus belle dans sa langue originale ; mais lui qui était japonais, et qui était déjà béni pour son don en anglais, il n’allait pas se mettre au français. Et puis, qu’on parle couramment une langue ou non, il n’est pas aisé de saisir toutes les subtilités d’un poème lorsqu’on le lit en langue étrangère. Kurogane pesta. Cette fille, sans être prétentieuse, savait se faire agaçante lorsqu’elle lui faisait remarquer qu’elle lui était supérieure du point de vue intellectuel. Elle était américaine, à la base, d’après ses souvenirs. Sa langue maternelle était donc l’anglais. Combien d’autres langues parlait-elle, au juste ? Et combien de temps lui avait-il suffi pour les maîtriser à ce point ? Le jeune homme jeta un regard furibond, plein de jalousie à la cobaye. Ce n’était pas juste. Pourquoi, elle qui n’était même pas née naturellement, était-elle plus douée que les êtres humains « normaux » ? Pourquoi est-ce qu’il se sentait toujours si mal près d’elle, si inférieur à elle, lorsqu’il se rendait compte qu’il ne serait probablement jamais capable de la dépasser dans quelque domaine que ce soit, lui qui avait toujours été le premier en tout ? A cette pensée angoissante, il se mordit les lèvres, et sortit son zippo qu’il commença à faire claquer nerveusement, tandis que son amie fouillait dans ses placards à la recherche de la relique. Malgré tout, il devait avouer qu’il était curieux de découvrir la beauté des vers dans leur langue originale.
Le magnifique exemplaire des Fleurs du Mal qu’elle lui tendit, si ancien, si précieux, et si doux au toucher le ravit tant qu’il lui en fit oublier ces sombres pensées. Inclinant automatiquement la tête en signe de remercîment, il prit religieusement l’ouvrage entre ses mains, et l’ouvrit lentement, comme pour faire durer le plaisir, émerveillé. Le calme avant la tempête. A peine avait-il commencé à lire les premiers mots de Réversibilité, son poème favori, que les cris commencèrent. Kurogane, surpris, releva ses yeux écarlates vers le cobaye, et la vit se jeter sur son casque comme la misère s’abattant sur le pauvre monde. Le jeune homme ne put s’empêcher d’esquisser un léger sourire. C’était vrai, il avait choisi ce poème exprès pour cette occasion, en hommage à ses yeux si mystérieux qu’il n’avait encore jamais eu l’occasion de voir, auparavant ; mais non seulement il était loin de se douter, en entrant dans la pièce, qu’il aurait la chance de les voir, mais en plus, il ne comprenait pas pourquoi elle paraissait soudain si outrée. Elle réagissait exactement comme si il les lui avait volés. Pourtant, il n’avait fait qu’y plonger son propre regard. Ses globes oculaires si fragiles étaient toujours dans leurs orbites, c’était ce qui comptait, non ? Apparemment, non. Voilà qu’elle piquait une crise. Le sourire de l’assassin s’évanouit en un instant. Brusquement, il se leva. Fini de jouer. Elle qui était si puissante, la voir en colère était, d’instinct, très mauvais. Il n’avait pas peur d’elle, loin de là. Même s’il était sûrement moins fort qu’elle, Kurogane avait suffisamment confiance en lui-même et en ses compétences. De son vivant, il était le meilleur assassin de tout Tokyo, tout de même. Mais lui qui venait de se réveiller, il n’avait tout simplement pas envie de supporter les cris et les coups. L’objectif présent était donc de la calmer dans la mesure du possible, et vite, avant que sa colère ne dégénère en violence. Il la regardait, placide, ses prunelles écarlates aussi froides et dures que de la glace, trépigner sur place, il l’écoutait lui hurler dessus sans vergogne, lui cracher son venin au visage. Si cela pouvait la calmer, il était prêt à lui faire cette fleur, et à supporter une dernière fois ses excès d’humeur. Il ne pouvait plus lire ses émotions dans son regard, à présent ; mais dans sa voix, légèrement tremblante, il sentait la peur, une peur profonde et irrationnelle, comme celle d’un enfant qui avait peur du noir. Une peur de l’inconnu. A cet instant, il aurait presque eu pitié d’elle. Mais il s’agissait simplement de survivre, pour lui, à cet instant là. Voilà qu’il devait se justifier, maintenant. Bon sang. Quelle prise de tête, parfois, cette fille ! Dire que si Nephtys avait été quelqu’un d’autre, il aurait suffit d’une bonne claque pour la faire taire…
« Arrête de crier, Nepthys, tu commences sérieusement à m’énerver. » Marmonna-t-il, en plissant les paupières. « Non, je ne savais pas, en entrant, que j’aurais l’occasion de voir tes yeux. J’ai eu de la chance, c’est tout. Tu as ma parole. »
Comment osait-elle l’accuser de tels propos, lui qui avait toujours souffert à cause de ses yeux ? Lui qui avait toujours été rejeté, méprisé, craint à cause d’eux ? Pire encore, lui qui avait perdu sa famille entière, et avait failli mourir lui même pour ses pupilles rouges ? Mais il n’était pas encore l’heure d’en parler avec elle. Ce fut ce moment précis qu’elle choisit pour s’attarder sur les vraies raisons de sa venue. Bien sûr qu’il n’était pas allé jusqu’à casser son verrou simplement pour lui lire de la poésie. Simplement… Ce n’était pas aisé à avouer.
« Pourquoi je suis venu… » Murmura-t-il, l’air songeur, détournant de nouveau son regard.
Il se tut un instant, pour clarifier ses idées. Elle en profita pour lever la main sur lui. Par réflexe, il saisit fermement son poignet, et lança, le regard furieux :
« Nepthys, ne fais pas quelque chose que tu pourrais regretter. »
Kurogane avait de la patience lorsqu’il s’agissait des filles ou de ses amis, parce qu’il ne voulait pas être réduit à recourir à la violence avec eux. Mais comme on le dit si bien au japon, à force de tirer sur le fil, le sac de la patience se rompt. Et à force de tant de violence et de colère, le jeune homme venait d’atteindre sa limite. Une lourde tension s’installa dans la pièce ; une tension meurtrière, malsaine, qu’on ne trouvait qu’entre les assassins d’élite. Le moindre mot, le moindre geste déplacé aurait sûrement pu déclencher la tempête. Prenant bien soin de l’accabler de son regard menaçant, signe qu’il fallait qu’elle arrête ses caprices d’enfant à l’instant, il la lâcha d’un coup, et lui tourna le dos. Calmement, il retourna s’asseoir sur le lit, le dos courbé, ses coudes appuyés sur ses cuisses.
« Si je suis venu, en fait… Tu vas peut-être trouver ça ridicule, mais… C’était parce que je voulais simplement discuter avec toi. Tu m’intrigues beaucoup, Nephtys. J’aimerais mieux te connaître. »
Il baissa les yeux au sol, presque honteux de ses paroles. Allait-elle le croire, maintenant, elle qui était si furieuse contre lui, Mais elle savait bien que Kurogane était quelqu’un de franc, et que lorsqu’il disait quelque chose, il le pensait. Il leva son regard rouge vers elle, silencieux. Il n’y avait plus qu’à espérer qu’elle le croie, maintenant. | |
| | | Nephtys
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Sam 4 Sep - 17:31 | |
| You made a mess For Christ sake, this rotten world Shit out of luck Go with my vision Light up the fire Right on the power Weapon... I have it all
MESS~ Red Fraction Qu'il se taise. Qu'il se taise. Mais qu'il se taise! Elle le détestait. Elle les détestait tous. Paranoïa, mon cul! Elle savait très bien qu'ils la haïssaient tous, que tout le monde avait peur d'elle. Il était venu par pitié, il mentait, c'était évident. Pourquoi est-ce qu'ils étaient tous comme ça? Elle leur avait rien fait, elle leur avait pas craché à la gueule, elle avait pas été trop violente avec eux. Elle acceptait même de communiquer avec eux! Alors merde, c'était quoi ça? La colère l'envahissait trop vite. Avec son poing levé, elle se laissait submerger par la colère et la rancune. Il devait y avoir une raison, une raison pour laquelle il était venu. Ce n'était pas elle qui était rentrée par effraction dans sa chambre! Ce n'était pas elle qui avait commencé à lui conter des poèmes à propos d'un sujet tabou!! Elle, oui elle, n'avait jamais mentionné la Mafia devant le jeune homme, car cela l'aurait peut-être dérangé, lui aurait rappelé des souvenirs. Ce n'était pas elle la responsable! Ce n'était que sa faute à lui, si elle se mettait dans cet état. Elle allait lancer son poing, mais le jeune homme lui maintint fermement le poignet, ses yeux soudainement durcis. Il s'était petit à petit renfermé alors que la cobaye crachait son venin, impuissante face à sa propre faiblesse. Elle grinça des dents.
"Je n'ai jamais rien regretté."
Mais ce n'était pas vrai, n'est-ce pas? Tout le monde avait quelque chose à regretter. Une mort de trop sur la conscience, une parole jamais prononcée... Mais non. Nephtys croyait dur comme fer qu'elle n'avait aucun regret de sa vie précédente. Elle avait été éduquée ainsi. Elle n'avait jamais été honteuse du sang qui la tachait, du bain dans lequel elle avait toujours baigné. Où était la honte, si on n'avait jamais pris conscience de la valeur d'une vie humaine? Si on avait toujours appliqué les ordres à la lettre, sans vraiment se demander ce qu'ils signifiaient, ce qu'il y avait derrière, toute cette masse stagnante et gluante de cruauté humaine. Non, Nephtys ne connaissait pas cela; peut-être Kurogane, lui, était au courant. C'était même certain. La Mafia, c'était ce qu'il y avait de plus noir dans le monde. En tout cas, c'était ce que disaient les instructeurs de Nephtys dans sa jeunesse. Mais entre l'armée et la Mafia, la seule différence n'était pas l'argent, n'était pas les combats, n'était pas les tueries. La seule différence se tenait dans le fait que les uns combattaient avec la bénédiction de la loi, et les autres sans. Il n'y avait aucune différence question scrupules, à part peut-être quelques idéalistes. Mais ce ne devait pas vraiment être le cas de la part des américains, on est bien d'accords. Cela, Nephtys ne le réalisait pas. Elle était si forte, si faible; elle connaissait tout sans vraiment comprendre. Elle récitait des dizaines de poèmes sans en chercher les sens intrinsèques; elle tuait sans émotions, et ne cherchait pas à connaître ses victimes. Comme elle n'avait jamais tenté de connaître un cœur humain.
Oui, quelle était l'utilité de l'amitié? Qu'est-ce qu'on en avait à foutre, franchement, de l'amitié? Regardez-le, ce jeune homme, qui s'est levé, plus grand qu'elle, soutenant son regard, regard caché par un casque infrarouge. Et la cobaye pouvait voir combien ce regard assassin s'était subitement glacé. L'amitié? Ahah. Quelle blague. Son poignet lui faisait mal. Il avait une forte poigne. Elle serra les muscles, et blanchit ses jointures pour exercer une contre-force par rapport au jeune homme. Elle ne perdait jamais, de toute manière. Et cette pensée fut comme approuvée quand tout d'un coup le japonais la lâcha, et alla se rassoir sur le lit. La suite cloua la cobaye sur place. Elle oublia même le fait d'être en colère. Quoi? La connaître, elle? Pff, c'était d'une puérilité, d'un égoïsme éclatants! Pourquoi la connaître, elle? Il y avait bien d'autres personnes bien plus intéressantes sur la Nef. Non, bien plus dignes d'intérêt, en fait. Il n'y avait aucune raison pour qu'il s'intéresse à elle. La jeune femme ne comprenait pas, n'essayait pas de comprendre ce qui lui arrivait. Ce mec entrait dans sa chambre pour tenter de la connaître. Elle ne comprenait vraiment, vraiment pas pourquoi. De nombreuses pensées et phrases se bousculaient dans son esprit, mais elle ne parvenait pas à en isoler une seule. Elle eut un demi-sourire alors qu'il s'était de nouveau assis sur son lit. Elle alla elle aussi s'y assoir, en tailleur, contre le mur, passant à côté du jeune homme.
"Hein. Héhé. C'était tellement inattendu que ça m'a fait l'effet d'une douche froide."
Elle attrapa une bouteille d'eau qui reposait sur la petite table de nuit, l'ouvrit, et s'en versa un peu sur le visage et dans les cheveux. Elle frissonna.
"Bon. Tu veux me connaître, hein? Et pourquoi donc? Qu'est-ce que je pourrais bien t'apporter?"
Elle passa sa langue contre ses lèvres. Elle prit une de ses immenses mèches de cheveux nacrés et joua pensivement avec.
"Peut-être es-tu intrigué par moi car je suis totalement différente de vous. Je n'ai pas trop eu le choix, tu sais. Mais là-dessus tu devrais certainement comprendre de quoi je parle. Assassin à ton âge. Enfin, je dis rien."
Elle aimait jouer avec les cheveux. Sa main chercha ceux du jeune homme. Sa combinaison s'ouvrit au bout de ses doigts, et elle put apprécier le toucher des cheveux du japonais. Ils étaient très lisses, et assez épais; comme la plupart des cheveux d'Asie dite "jaune". Elle retira sa main. Sa langue repassa sur ses lèvres.
"J'ai eu une croissance accélérée. A l'âge d'un an je faisais déjà des missions pour l'état. Pas encore de très haute importance; mais pendant 23 ans je n'ai connu que la mort. Comment je pourrais comprendre que quelqu'un veuille me connaître? Je n'ai même pas des sentiments normaux. Et même si je pouvais en avoir, tu vois bien comment je pète les plombs dans ces cas-là."
Elle finit par se taire. Il avait de quoi répondre. De quoi réfléchir. Ou tout simplement, de quoi s'en aller. Mais après lui avoir dit tout cela, peut-être serait-elle un peu déçue de le voir partir. Peut-être.
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| | | Kurogane
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Lun 6 Sep - 0:51 | |
| The hardest thing for me is Facing the fear I live No one can help me now it’s under my heart I’ll come to know the living My demons are inside I’ll bring them all to light.
Bring them to light – Apocalyptica. Assis sur le lit de la demoiselle, Kuro regardait le mur du fond, les yeux perdus dans le vide de la pièce. Silencieux, attendant de voir sa réaction après la confidence qu’il avait osé lui faire, il la vit sourire. Bien entendu, il se vexa. Comment pouvait-elle sourire, après ce qu’il venait de lui annoncer ? Se fichait-elle de lui ? Le trouvait-elle ridicule, à se montrer aussi sentimental ? Ou bien était-ce un sourire d’impatience, comme suite à un défi ? Il la suivit du regard, et la vit, avec surprise, s’asseoir près de lui. Ca non plus, il ne savait pas comment il fallait qu’il le prenne.
« Désolé de t’avoir surprise. Je ne m’attendais pas à te faire tant d’effet du premier coup. » Dit-il simplement, en détournant son regard rouge vers elle.
Ce fut à cet instant qu’il écarquilla les yeux, pétrifié de stupeur, face à la vue que lui offrait le cobaye : Nepthys, si belle, si gracieuse, et surtout, si attirante, qui se versait brusquement de l’eau sur les cheveux et le corps. Comme frappé par la foudre, l’adolescent fixait ses mèches brillantes, ses lèvres pulpeuses et humides, sa gorge parsemée de perles argentées. Heureusement que sa combinaison était étanche et cachait sa poitrine. Kuro déglutit avec difficulté, et se força, dans un élan de courage incroyable, luttant contre ses pulsions, à détourner le regard. Vite, il fallait se calmer. Se rendait-elle compte de ce qu’elle venait de provoquer chez lui, le connaissant ? Non. Impossible. Cette fille ne semblait absolument rien connaître au langage du corps. Mais innocence ou pas, elle l’avait par ce seul geste troublé pour la journée. Le pauvre. Déjà qu’il était suffisamment attiré par elle. Voilà qu’elle lui compliquait la tâche. Il songeait, terrifié, en regardant la porte :
* Vite, penser à des trucs pas sexy, sinon je peux dire au revoir au plan amitié avec elle. Déjà qu’elle se méfie de moi. Bon, voyons… Un sandwich. Non, Raijin. Ah, oui, c’est bien, ça, Raijin. Raijin et son horrible manteau de fourrure violet, ses lunettes de mouche… *
Heureusement, la voix de la jeune femme l’arracha à sa torture intérieure juste à temps, et réussit à lui faire oublier son angoisse passagère… tant bien que mal. Ses paroles étaient bien cruelles. Mais Kuro avait parfaitement compris ce qui lui arrivait. Forcément, il était pareil. Au fond de lui, même s’il voulait désespérément être aimé, il avait peur que quelqu’un le comprenne et le connaisse vraiment. Car lui qui avait tout perdu, la seule chose qui lui restait vraiment était son propre esprit. Ce devait être pareil pour Nephtys. C’est ce qu’elle tenta de lui expliquer, de façon très claire et très froide, apparemment. Enfin, maintenant, il y était habitué, avec elle. Par rapport à lui qui était si sensible et si intuitif, se confronter à quelqu’un d’aussi froid et neutre le déstabilisait parfois. Le jeune homme répondit alors, les yeux fixés au plafond, comme s’il se refusait à se l’avouer :
« Au contraire. Si je veux te connaître, c’est justement parce que tu me ressembles, Nephtys. Comme moi, tu es un assassin, tu es solitaire, tu ne parles pas de ton passé… et je pense que tu souffres en silence. »
* En tous cas, moi oui. * Pensa-t-il, en regardant ses poignets couverts de cicatrices, qu’il ne cherchait même plus à cacher.
Dire que sur cette Nef de malheur, cela ne servait même plus à rien de se blesser. Silencieux, il écoutait la voix à la fois douce et grave de la cobaye, mais ne semblait pas réagir, comme s’il se laissait bercer par ce timbre agréable. Il se mit à faire claquer de plus belle son zippo, toujours dans sa main, signe qu’il angoissait plus encore. Décidément, tous ces aveux n’étaient ni une mince affaire, ni une partie de plaisir pour lui. Le peu que la cobaye voulut bien lui apprendre à son propos n’arrangea pas les choses. Alors elle était vraiment née en labo, créée artificiellement, dans le seul but de tuer… Avait-elle eu des parents, comme lui avait eu la chance d’en avoir, même si cela n’avait duré que dix ans ? Comme elle avait dû souffrir, dans sa solitude. Comme elle avait dû avoir peur, de grandir, de survivre parmi les autres qui devaient autant la craindre que la détester. Exactement ce qu’il avait vécu. Le stress qui lui comprimait l’estomac était à présent si fort qu’il avait presque l’impression que si sa peau était à vif, et qu’on lui versait des litres de jus de citron sur tout le corps. Il finit par répondre franchement, d’une voix un peu tremblante, posant ses mains sur ses yeux comme pour ne pas voir la vérité en face, gardant son zippo dans son poing fermé :
« Moi aussi, je suis différent. Ca m’a énervé quand tu t’es vexée pour tes yeux parce que tu n’es pas la seule à en avoir souffert. C’est à cause de nos pupilles rouges que ma famille entière est morte. Et crois moi, dans le monde d’où je viens, elles n’ont jamais été un avantage. Au contraire. Les gens avaient peur de moi, me rejetaient… depuis mon enfance. »
Il se tut un instant, puis souffla, laissant glisser ses mains sur ses genoux pour les serrer de toutes ses forces, contractant ses bras :
« Nous sommes pareils. »
Peut importe si elle le prenait mal, si elle le frappait, si elle lui cassait un os. Il s’en fichait. C’était enfin sorti, et c’était tout ce qui comptait, à présent. Kurogane détourna son regard triste et vide vers la cobaye ; un regard mort, son vrai regard, qu’il ne montrait à personne. Mais étrangement, mais s’il ne connaissait pas encore beaucoup Nephtys, il se sentait assez proche d’elle pour pouvoir se le permettre. Ou peut-être était-ce ce surplus d’émotions qu’il gardait enfermées en lui depuis trop longtemps. Peut-être prenait-il trop de libertés avec elle. Mais jamais il n’aurait cru pouvoir trouver quelqu’un qui lui ressemblait un tant soi peu sur ce bateau. D’un coup, il se leva, et lança, de cette même voix tremblante :
« Tu peux péter les plombs, je m’en fous. Je suis quelqu’un de résistant, et je ne me laisse pas faire. Alors… Laisse-moi rester encore un peu avec toi. Parle-moi de toi. S’il te plaît. »
* J’aimerais tellement que tu me dises, si, toi aussi, tu as jamais ressenti ce que je ressens chaque jour de ma vie. *
L’angoisse. Le remord. La solitude. Tous ces sentiments si durs et qui pourtant ne le quittaient jamais. En cet instant, Nepthys et Kurogane auraient pu représenter de parfaits contraires. L’adolescent ultrasensible et qui ne savait pas gérer ses émotions, et la jeune adulte froide et blasée, qui ne ressentait rien, ne savait pas ressentir. Un mélange aussi hétérogène qu’explosif. Et pourtant… Il pourrait peut-être se fondre en un seul et même tout, avec le temps. Deux opposés qui s’attirent et se complètent ; comme deux aimants, comme l’ombre et la lumière, comme la matière et le néant. Kuro détourna une fois de plus ses yeux, humides et gonflés par le chagrin, vers la jeune femme assise face à lui. Il s’était ouvert à elle. Allait-elle faire de même ? Allait-elle l’accepter ? Tout dépendait de sa réponse, à présent. | |
| | | Nephtys
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Mar 7 Sep - 19:37 | |
| Alors qu'elle parlait, le jeune homme semblait se renfermer de plus en plus, comme si la voix morne et plate de la cobaye lui rappelait quelques souvenirs incertains et douloureux. Nephtys n'avais pas de souvenirs douloureux. Seulement des souvenirs. Elle ne parvenait pas à savoir les sentiments qu'elle éprouvait, lors de ces souvenirs. Elle se disait seulement qu'elle devait être bien pitoyable, à devoir ainsi rester de marbre devant n'importe quelle situation. Puis il se mit à lui répondre. Ah, lui aussi avait souffert à cause de ses yeux? Mais ce n'était pas la même situation du tout. Cependant, alors que Kurogane s'ouvrait à elle ainsi, elle acquiesça, n'osant pas le contredire. Bien qu'elle aurait voulu lui dire que non, ils n'étaient pas du tout pareils. Car, à part leurs métiers similaires, ils étaient radicalement opposés. Lui, si impétueux, manipulé par ses sensations et ses ressentis; elle, froide et de sang-froid, refusant l'existence du sentiment en elle. Sauf que le sentiment devait bien être présent quelque part, si elle était capable de se mettre dans une telle rage que celle qui l'avait prise quelques instants plus tôt. Oui, elle devait certainement être capable de ressentis, mais elle ne savait pas les canaliser; et ses états-d'âme étaient bien plus chaotiques que ceux de Kurogane qui, finalement, avait fini par être habitué à son caractère et sa sensibilité. Il savait faire la part des choses entre métier, c'est-à-dire tuer de sang-froid, et vivre, vivre avec un sang brûlant et passionné. Ce que Nephtys, de son côté, était strictement incapable de faire.
Il sembla à la cobaye que le jeune homme avait tout entendu de ses pensées intérieures. Quoi, lui, capable de la comprendre? Mais si ça se trouve, il était juste un peu perdu. Nephtys ne lui avait jamais demandé son âge; celui qu'il avait avant d'arriver sur la nef. Dix-sept, dix-huit ans peut-être? Elle qui en avait vingt-quatre, et qui en avait vécu déjà vingt-trois dans le corps d'un adulte, n'avait pu ressentir les effets de l'adolescence. Ainsi, elle eut un peu de mal à saisir pourquoi le jeune homme voulait absolument rester dans sa chambre. Mais elle hocha la tête alors qu'il tentait de la sonder, pour obtenir une réponse.
"Oui, tu peux rester si tu veux. Mais comme tu as l'air de vouloir, je n'avais pas spécialement à le préciser."
Le jeune homme s'était détourné d'elle, cachant son visage. Elle alla s'assoir près de lui, bougeant un peu de son coin de mur pour aller au bord du lit. Elle lui prit délicatement le menton et le tourna dans sa direction.
"C'est quoi ça? Tes yeux sont gonflés. Tu es triste? C'est ma faute?"
Elle n'arrivait pas à déterminer la cause du chagrin du jeune homme. Mais elle avait lu quelque part qu'on ne pleurait pas seulement de tristesse.
"Ou alors, peut-être que tu es en colère? Ou bien joyeux?"
Elle ne comprenait vraiment pas le garçon. D'abord il arrive, tout fanfaronnant, lui lit des poèmes, contrôle très bien la situation quand elle s'emporte, et puis là... Elle avait l'impression de devoir s'occuper d'un petit enfant. La cobaye songea alors qu'elle lui avait peut-être ravivé des souvenirs difficiles pour lui. Et puis de toute manière, il s'attendait certainement à ce qu'elle parle, non? Il lui avait demandé de parler d'elle. Mais que pouvait-elle lui dire? Rien, absolument rien. Le condensé qu'elle lui avait fait suffisait amplement à résumer sa vie passée. Elle ne voyait pas ce qu'elle pourrait bien ajouter. Puis elle scruta les yeux du jeune homme, et soudain détourna le regard.
"Je ne savais pas pour tes yeux."
Que rajouter? Lui dire? Le lui dire vraiment? Mais c'était dévoiler une faiblesse; et elle avait appris à ne jamais dévoiler ses faiblesses. Mais, en regardant le jeune assassin prostré sur son lit, la cobaye se dit que niveau faiblesse, ce n'était pas elle qui s'était le plus dévoilée. Elle pris une grande inspiration, puis souffla juste.
"Je ne vois pas les couleurs. C'est un casque infrarouge. Même à mon époque, mes yeux étaient trop abimés pour les régénérer, et comme le casque est relié au nerf optique, qui était lui aussi très endommagé, il a été préféré que j'aie un casque à vision infrarouge, dont la fréquence de vibration d'ondes est moins forte et donc me fatigue moins, plutôt qu'un casque à vision couleur. Donc, je ne me suis jamais rendu compte pour tes yeux. Parfois, j'arrive à deviner les couleurs; par exemple je sais quand quelqu'un est blond ou brun. Je différencie mal les roux. Mais je pensais que tu avais les yeux marrons. Je fais mal la différence entre brun et rouge."
Elle prit elle ses jambes entre ses bras, posa ses pieds sur le rebord du lit et son menton sur ses genoux. Puis elle regarda droit devant elle.
"C'est un secret. Et puis, je suis désolée pour toi. Tu n'as pas dû vivre des choses faciles non plus. Mais comme je ne parviens pas à avoir des regrets ou des traumatismes par rapport à ma vie passée, je ne pense pas bien comprendre pourquoi tu te mets dans un tel état."
C'est ce qu'elle croyait tout du moins. Elle espérait juste ne pas l'avoir froissé. Nephtys n'était pas vraiment très éloquente.
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| | | Kurogane
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Dim 12 Sep - 0:33 | |
| 瑠璃の色に輝く空 大地は萌えて 祈りを讃える 人は常に風にのせて歌い 続ける会い道溢れて言葉を Kagrra, "irodori no sanka". Lorsqu’elle hocha la tête, et qu’elle lui donna la permission de rester, l’adolescent baissa brusquement les yeux, et un léger sourire se dessina sur son visage. Doucement, lui qui était encore si tendu il y avait quelques instants, il se relâcha, et poussa un long soupir de soulagement. Ce n’étaient peut-être que quelques mots de politesse, ou du moins qui n’avaient pas grandement de sens pour elle, mais pour lui, c’était bien plus. Une marque de confiance, mais aussi, d’acceptation. Et ces quelques mots seulement étaient amplement suffisants.
« Merci… » Murmura-t-il, l’air tout de même gêné.
Sur ce, il détourna le regard, et rit nerveusement.
« J’ai l’air stupide, hein… » Ajouta-t-il, pour lui seul, comme si l’autodérision le soulageait.
Il ne put s’empêcher de passer sa main dans ses cheveux, derrière sa tête. Encore un tic qu’il avait pris dans les dramas et les anime. Enfin bon, au Japon, tout le monde les prenait, de toute façon. Malgré son soulagement apparent, il était tout de même un peu honteux de cette explosion émotionnelle qui l’avait pris. Il avait toujours été comme ça, toujours trop sensible, et sujet à des crises de nerfs, mais jamais devant les autres, d’habitude. Parce qu’il ne pouvait pas se permettre, de son « vivant » de perdre la face devant qui que ce soit ; il avait un rôle à jouer, une réputation à tenir, celle du méchant mafieux. Plus facile à dire qu’à faire, surtout lorsqu’on était torturé comme lui. Les japonais étaient spécialisés dans les codes de conduite et l’obsession de ne jamais perdre le contrôle de soi même devant qui que soit, après tout. Décidément, lui qui allait probablement passer l’éternité ici, il devrait essayer d’oublier un peu toutes ces tares de sa société d’origine. Mais peut-être s’y raccrochait-il tellement parce que c’était la dernière chose qui lui restait de ce monde qu’il détestait, la seule et dernière preuve qu’il avait vécu au Japon, et vécu à proprement parler. Lorsqu’elle lui prit le menton, et qu’elle le questionna sur son état, il rougit légèrement. Il aimait être materné. C’était vrai que pour elle qui ignorait la colère, la rancœur, la tristesse, il était normal qu’elle ne comprenne pas ce qui était en train d’arriver au jeune homme.
« C’est rien… » Dit-il, pudiquement, en reniflant. « Et non, c’est pas de ta faute. »
Il détourna de nouveau le regard, comme s’il avait trop honte de la situation pour pouvoir même la regarder. Il faut dire que sa fierté venait d’en prendre un coup. L’air soudain amusé, comme touché par l’innocence de son amie, il ajouta alors, en riant un peu :
« Parfois, lorsque les gens repensent à des souvenirs douloureux de leur passé, ils sont tristes. Ca arrive. »
Puis, il se mit à rire franchement, un rire pur, presque enfantin. Lui qui n’avait pas eu d’enfance, et qui avait grandi trop vite, il semblait être resté un petit garçon, au fond de lui, parfois.
« Ah… Désolé, je me donne en spectacle. Je suis tellement égocentrique, faut dire. J’adore quand les gens s’inquiètent pour moi… »
Il ricana de nouveau, cette fois-ci pour se moquer de lui même, et détourna enfin son regard vers Nephtys. Il ne reverrait probablement plus jamais ses si jolis yeux gris. Tandis qu’elle reprenait la parole, Kurogane en profita pour sortit une cigarette de sa poche, et l’alluma, avec son zippo resté enfermé entre ses doigts. La bouffée de nicotine lui arracha un soupir de soulagement, comme si toutes ses angoisses et ses problèmes disparaissaient soudainement. Comme s’il en était libéré. Au moment où elle fit de nouveau allusion à ses prunelles rouges, il lâcha, presque automatiquement :
« T’inquiète pas. Tu n’y es pour rien. Je suis né avec, après tout. On ne choisit pas sa vie. »
Il prit une bouffée de fumée, qu’il souffla lentement, comme pour faire descendre la pression. Mais qu’aurait-il fait, s’il avait pu choisir, justement ? Aurait-il vécu à une autre époque, sur un autre continent ? Qu’est-ce que ça changeait, finalement ? Qui qu’on soit, où qu’on soit, et quoi qu’on fasse, la vie restera toujours aussi cruelle, après tout. Elle le sera juste de façon différente pour chacun. C’était la première chose qu’il avait apprise, dans la mafia. Lui avait perdu ses parents, son monde ; d’autres en étaient réduits à vendre leurs corps, de la drogue, ou des armes pour survivre, parce qu’il ne leur restait plus rien, où qu’ils n’avaient pas le choix. Le même malheur, adapté à chacun. C’était ça, pour lui, la vie à Tokyo. Il fut agréablement surpris lorsqu’elle commença à lui parler d’elle, de ses propres yeux, ce grand tabou. Le jeune homme l’écouta patiemment, l’air captivé, ne prenant même pas la peine de tirer une bouffée de sa cigarette qui se consumait entre ses doigts. Un long sourire s’étira sur son visage.
« Oh, tu sais, c’est pas grave, hein. D’habitude, le rouge fait peur aux gens. Je pense que c’est parce que ça fait un peu démon. Mais ça ne me déplaît pas. »
Il ricana une nouvelle fois, mais cette fois-ci, de fierté. Même s’il avait souffert à cause d’elles, il était attaché à ses prunelles rouges. Elles représentaient sa famille disparue, après tout.
« Promis, je ne le dirai à personne. Je compte sur toi pour faire de même, bien entendu. »
Il ajouta, d’un ton plus ferme :
« Ne t’excuse pas. Tu as le droit de ne pas comprendre ce que sont les sentiments. Ca viendra avec le temps, probablement. Tu as l’éternité pour ça, ça devrait suffire, non ? Je pourrai essayer de t’aider, si tu veux. Mais il ne faut pas suivre mon exemple. »
Décidément, il était très bavard, ce jour là. Elle devait vraiment l’intéresser, cette petite Nephtys. Il tira une longue bouffée de fumer, comme pour se donner un style, et lança, avec un sourire complice :
« Tu sais, Nephtys… Tes yeux sont très beaux. Je n’ai pas bien vu mais… Je crois qu’ils sont gris pâle. Couleur de lune. »
Lui qui vouait presque un culte à l’astre de la nuit qu’il ne reverrait jamais plus, c’était plus qu’un simple compliment qu’il venait de lui faire. Il jeta la cendre morte sur le parquet. Celle-ci disparut en un clin d’œil. Puis, il s’allongea, la tête et le dos à demi appuyés sur le mur, et s’enquit, l’air songeur :
« Dis, Nepthys… Tu viens du futur, par rapport à moi, vu que ma vie s’est arrêtée en 2019… Parle-moi de ton époque. Comment était le monde, en 2071 ? Le Japon existe-t-il encore ? »
A ces mots, il détourna son regard rouge vers elle, comme pour lui montrer qu’il lui prêtait attention. La fin de sa phrase aurait pu être « ou a-t-il fini immergé à cause du réchauffement climatique ? » mais il avait suffisamment plombé l’ambiance pour la soirée. Dire qu’il l’aurait su sans embêter la jeune demoiselle, s’il avait vécu jusqu’au bout sa vie terrestre… Parler de son époque était-il aussi douloureux pour elle que ça l’était pour lui ? Et comment était ce futur si mystérieux, où la technologie semblait si avancée ? Il lui tardait déjà de le découvrir. | |
| | | Nephtys
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Lun 13 Sep - 23:10 | |
| Un instant, un fugace instant, elle se demanda si elle avait bien fait de lui parler de ses yeux. Que pourrait-il se passer si, dans un accès de colère, il révélait à tout le monde qu'elle ne voyait pas les couleurs? La plupart des gens imaginaient qu'elle portait son casque comme partie intégrante de sa combinaison, et qu'il était rempli de gadgets et autres logiciels hyper perfectionnés. Mais ce n'était qu'à moitié le cas, puisque son casque à infrarouges était d'excellente qualité et lui permettait effectivement d'accéder à de nombreux logiciels d'études. Mais ceux-ci marchaient beaucoup moins bien depuis qu'elle était sur la Nef. Ben oui, y'avait pas Internet. Mais Kurogane réagit bien, et se mit même à lui répondre.
"Des souvenirs douloureux..."
En avait-elle, des souvenirs douloureux? Pouvait-elle se dire qu'elle regrettait quelque chose au point d'en être mélancolique des années après? Mais Kurogane avait dit que cela arrivait. Ce ne devait donc pas être systématique. Puis soudain, il se mit à rire. Nephtys sursauta. Elle portait d'habitude peu d'importance au rire, qui était devenu sur la Nef une partie intégrante de l'environnement sonore, à cause du Fou et des autres enfants eux-mêmes piégés. Elle regarda le jeune homme allumer une cigarette. Dans l'obscurité, cela fit une lumière qui éclaira son visage. Nephtys regarda ces yeux, dont elle ne pourrait jamais discerner l'exacte couleur. Qu'était-ce, que le rouge? Ce devait être une couleur foncée, pour qu'elle la confonde avec le brun. Et en même temps une couleur chaude. On disait bien rouge sang, rouge passion, rouge colère, rouge feu. Ce devait vraiment être une très belle couleur. Un instant, la cobaye se dit que c'était dommage que les gens aient peur de cette couleur. Rouge démon, disait-il? Mais qu'étaient-ce, que les démons au juste? Ce n'étaient que de simples projections des peurs et des malaises des êtres humains. Si un malheur arrivait, ce devait être la cause d'un démon. Elle passa sa langue sur ses lèvres, pensive. Ce devait être pour cela qu'il avait souffert. Pour ces yeux qui semblaient porter malheur.
Elle fut profondément soulagée quand il lui promit de ne pas révéler son secret. Étrangement, même si elle avait baissé sa garde devant lui, elle se dit qu'elle pourrait peut-être lui faire confiance. Elle n'avait pas fait confiance à grand-monde, autrefois. Peut-être devrait-elle commencer avec ce jeune humain qui paraissait, en même temps, si renfermé, mais si prompt à s'ouvrir.
"Je veux bien apprendre ce que sont les sentiments alors. Tch. Je dois vraiment sonner comme une enfant de cinq ans. Mais finalement, je pense que c'est ça qui m'a fait défaut. Mon enfance. Enfin bref. Et c'est certain, ne t'en fais pas, que même en faisant beaucoup d'efforts je ne parviendrai certainement pas à ton niveau de sensibilité. Quoique. Tu arrives bien à maîtriser tes sentiments, quand la situation l'impose."
Puis il reparla de ses yeux, à elle. Il lui fit quelque chose qu'on lui faisait rarement. Un compliment. Elle se doutait que c'était un compliment, puisqu'elle avait toujours trouvé la lune belle. Et si ce n'était belle, c'était du moins esthétique. Et étrangement apaisante. Nephtys préférait tout naturellement la Lune au Soleil, puisque celle-ci lui meurtrissait moins le regard quand elle tentait de regarder le ciel. Et puis, la nuit, elle pouvait effectuer ses missions plus facilement. Comme tout assassin qui se respecte. Elle n'osa pourtant pas répondre à sa gentille phrase, puisqu'il continua tout de suite, lui dévoilant une curiosité étrange: cette passion qu'avait l'être humain à l'égard du futur l'avait toujours intriguée. Elle se demanda vaguement si elle devait le désillusionner ou pas. Elle s'assit à côté de lui, le regard toujours rivé sur la cigarette allumée, la fumée aigre lui picotant les narines. Elle n'avait jamais été permise de consommer quoique ce soit niveau substance comme l'alcool ou la drogue, ni de se consumer dans la luxure. Pour le maintien de sa perfection, disaient ses supérieurs. Mais finalement, elle ne savait pas vraiment si elle le regrettait ou si elle s'en foutait. Tout simplement. Elle se racla quelque peu la gorge, puis commença, assez schématiquement.
"Le monde en 2071... Finalement, je ne l'ai connu que officieusement. J'étais ce que l'on appelle un Secret d'État, tu sais. Mais je peux te donner quelques bribes d'informations. En 2049, l'humanité a frôlé l'extinction, à cause d'une révolte des machines qui avaient amélioré leur Intelligence Artificielle de façon exponentielle depuis les dernières années. Fort heureusement, un programme infaillible dont je ne pourrais te donner les exacts détails a réussi à abaisser brutalement le potentiel électrique des machines, et les a forcées à reprendre des activités, disons, plus normales. Les années passant, les humains ont arrêté de tout automatiser, et grâce au soutien des machines, géraient absolument tout. Mais dans mon monde, l'intelligence artificielle a presque été éradiquée, à part dans certains projets de l'armée ou pour des programmes simples dont l'amélioration de l'AI a été bridée. Pour ce qui est de la géo-politique, le monde a essuyé une guerre peu après la révolte des machines, en 2053, époque où j'étais encore peu utilisée pour les missions d'importance. J'ai été surprotégée à cette époque. La troisième guerre mondiale. 2053/2058. De ce que les généraux racontaient, elle était désastreuse. Les USA étaient encore la première puissance mondiale, mais défaillante, vieillissante, et la Chine et la Russie s'étaient unies, envahissant les pays alentours. Bientôt, toute l'Asie fut sous leur joug. Oui, même le Japon. D'ailleurs, pendant la guerre, un missile nucléaire envoyé vers Pékin pour forcer les hostilités à cesser a été mis en déroute, et est tombé dans le Pacifique. Ce qui fut désastreux, puisque les failles de Tokyo et de Los Angelas ont cédé. En gros, en 2071, la Californie et le Japon étaient rayés de la carte. Les eaux ont monté vers 2060, et des pays assez bas géographiquement ont été engloutis. Les Pays-Bas, le Bengladesh, une partie de l'Inde, de très nombreuses îles, la moitié du Brésil... Après la guerre, qui a duré cinq ans, il y a eu une colonisation massive des endroits normalement invivables, qui étaient devenus les seuls havres de paix. Et puis, les populations avaient été prévenues pour la montée des eaux. L'exode fut massif. Et moi, en attendant, j'exécutais des missions de rang A pour éradiquer les ennemis de l'état. Voilà."
Kurogane semblait bizarre, troublé. Elle ne parvenait que vaguement à comprendre pourquoi. Il était vrai qu'à son époque, l'être humain avait vécu désastres sur désastres. Elle avait eu de la chance, finalement, de ne rien avoir vu passer. Ou presque. La lueur de la cigarette, faiblarde, s'éteignit totalement. A tâtons, la cobaye chercha les cendres pour les enlever. Elle était à présent la seule à voir; le très peu de lumière dans la pièce permettaient aux infrarouges de fonctionner parfaitement. De son index gauche, elle effleura la joue du jeune homme. Elle crut la sentir de nouveau humide. Mais elle n'en fut pas certaine. Lentement, elle activa sa combinaison et découvrit ses bras blancs et sentit, d'un coup, sa peau contre celle de l'assassin.
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| | | Kurogane
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Jeu 16 Sep - 23:09 | |
| You don’t have to love everything about me if you care just a little If we spend our days together, you’ll eventually come to love me
traduction de "AROMA" – An Cafe Dans les dramas qu’il regardait lorsqu’il était encore sur terre, à Tokyo, Kuro avait déjà vu ce genre de situation. C’en était presque devenu un cliché, d’ailleurs. Une fille renfermée et timide, un peu sauvage, et le mec populaire et sûr de lui, qui s’aguichait d’elle et se mettait dans la tête de la métamorphoser. A cette pensée, le jeune homme rit seul. Serait-il capable de changer le glaçon qu’était Nephtys en jolie fleur sensible et attentionnée, susceptible de lui faire son bentô tous les jours et de mettre des mini-jupes ? Et un uniforme ? Oh, oui, un mignon petit uniforme, et puis des barrettes en forme de fraise dans les cheveux, des petites culottes en coton avec des mignons petits imprimés, et puis… Non, impossible. Voilà qu’il délirait encore. Ca lui prenait souvent, mais là… Kuro soupira. Il était franchement irrécupérable. Enfin, il n’y avait que des gens bizarres sur cette Nef, de toute façon. Il n’était sûrement pas le pire de tous. Oui, peut-être qu’il ne serait jamais capable d’en faire la lycéenne japonaise mignonne et attentionnée dont il rêvait, mais peut-être qu’il arriverait à la changer en fille, au moins. Ou quoi que ce soit d’autre qui soit capable de ressentir quoi que ce soit. Allons dire, au moins, qu’il en ferait un être humain. « Yosh ! » Songea-t-il, en serrant son poing tout seul dans son coin, fixant le mur d’en face avec des yeux empreints d’une grande détermination. « Kami-sama, je ferai de cette chose une femme, j’en fais le serment ! » Songea-t-il, toujours sur sa planète de pop culture. Heureusement, l’intervention de Nephtys l’arracha à ses chimères. Au semblant de compliment que la jeune fille lui fit, Kurogane se surprit lui même à sourire. Il lança alors, d’un ton fier, comme s’il s’en félicitait :
« Evidemment que je sais me contrôler. Je suis un méchant yakuza, après tout. Je fais peur à tout le monde. Et puis, cette obsession de ne pas perdre la face, ça doit venir de ma culture, je pense. On dit bien « Le Japonais en colère sourit » pas vrai ? Même si j’ai plus tendance à frapper les gens, quand je m’énerve… »
A ces mots, il ricana doucement, comme si de vieux souvenirs lui traversaient soudain l’esprit. Mais peu à peu, le fragile sourire qui s’était installé sur ses lèvres disparut. Nepthys avait entamé son récit concernant le futur. Recouvrant soudainement un air plus sérieux, n’osant presque pas toucher à sa cigarette bientôt achevée, il écoutait, sans mot dire. C’était cent fois pire que tout ce qu’il avait pu imaginer ou voir dans les films hollywoodiens de son enfance. Elle en vint aux gigantesques pertes humaines. Le regard à présent complètement éteint, Kurogane leva les yeux vers le plafond. S’il y avait une puissance céleste qui gouvernait le monde, pourquoi laissait-elle faire des choses aussi horribles ? Etait-ce pour punir les hommes de leurs excès ? Ou considérait-elle qu’il n’y avait plus rien à faire pour eux ? Alors y il avait eu une troisième guerre mondiale, finalement. A ces mots, l’estomac du jeune japonais se serra plus encore. Depuis sa plus tendre enfance, il avait toujours vu son peuple souffrir du souvenir de la seconde guerre ; de la bombe atomique qui avait dévasté Hiroshima et Nagasaki les 6 et 9 Août 45. Pourquoi ? Pourquoi, après tant de souffrances, fallait-il que tout cela se répète encore et encore ? La cruauté humaine n’avait-elle donc aucune limite ? Lui qui était mafieux et tueur à gages, il était pourtant bien placé pour le savoir. Le second coup fatal qu’elle lui porta fut lorsqu’elle lui annonça que le Japon avait été totalement rayé de la carte. Brusquement, à ces mots, il leva des yeux écarquillés vers elle. Des yeux pleins d’une sombre terreur. En 2071, tous ceux qu’il avait connus étaient morts. Son peuple entier avait disparu. Pétrifié, il baissa les yeux au sol. L’angoisse l’empêchait de prononcer le moindre mot, mais dans sa poitrine, son cœur se serrait. En 2071, lui aussi, s’il était resté sur terre, il serait mort. A 70 ans, certes, mais il aurait péri comme tout le monde. Elle termina par les catastrophes climatiques. Kurogane était à bout. Il ne voulait plus rien entendre. C’était trop dur. La peine était si forte qu’elle lui transperçait les entrailles et l’empêchait de faire le moindre mouvement. Par réflexe, il jeta un regard songeur vers la porte, comme s’il voulait fuir. Mais il resta assis sur le lit, immobile, tandis que la cendre de sa cigarette tombait sur ses vêtements. Lorsqu’elle mit fin à son affreuse accumulation de malheurs, il se laissa retomber brusquement sur le lit, et plissa les paupières de toutes ses forces, comme s’il refusait de voir la vérité en face. Rien que d’y penser, l’envie lui prenait de se tirer une balle dans la tête. Même si ici, ça ne servait à rien. Des larmes lui montèrent aux yeux, mais restèrent coincées sous ses paupières fermées. Aussi endurci qu’il était lorsqu’il s’agissait d’un meurtre, apprendre que des millions d’innocents avaient péri ne pouvait le laisser indifférent. C’était la nature humaine, après tout. Tâchant de reprendre le contrôle de lui même, ce dont il s’était tant vanté il y avait quelques instants, doucement, il essuya ses yeux et releva son buste. Sa cigarette s’éteignit, comme les milliers de vies humaines du récit de Nephtys. Il n’eût pas la force de s’en allumer une autre. Cette histoire lui en avait complètement coupé l’envie.
« Sô… ka. » Dit-il simplement, les yeux tristes, et d’un ton plat.
Après tout, c’était lui qui avait voulu en savoir plus sur le futur. La pauvre Nephtys n’avait fait que lui répondre. Il n’avait pas le droit de la mettre mal à l’aise de nouveau avec des réactions qu’elle ne pouvait pas encore comprendre. Lui qui avait des yeux pourtant entraînés, il n’y voyait presque plus rien, à présent. La lumière provenant du couloir, se glissant sous la porte, avait disparu. Ce fut à cet instant, où il semblait si abattu et mélancolique, qu’elle passa sa main sur sa joue. Il ferma de nouveau les yeux pour mieux apprécier l’instant. Il faut dire que Nephtys ne faisait pas souvent preuve de telles attentions envers lui. Il releva son regard rouge vers ce casque qui dissimulait ses beaux yeux, et, par réflexe, il attrapa son poignet. Un long silence s’installa. Dans les ténèbres, le jeune homme sourit. L’ambiance qui régnait à présent dans la pièce, légèrement intime, était très intéressante… et surtout... exploitable. Après tout, s’il devait lui apprendre à ressentir, pourquoi ne pas commencer dès à présent, dans ce cadre si particulier ? On aurait pu légitimement penser que ce garçon passait facilement du rire aux larmes et l’inverse, sans scrupules, alors que le sujet précédent était aussi grave. Il aurait même, pour cela, pu paraître volage ou lunatique. Mais ce n’était pas vraiment le cas. Il avait plutôt décidé, lui qui avait tellement souffert autrefois, de profiter le plus possible de chaque instant de sa vie tel qu’il était. En l’occurrence, il n’avait pas oublié sa tristesse, mais préférait penser à autre chose. Et la tournure que prenaient les évènements lui plaisait beaucoup. Une lueur espiègle s’alluma dans son regard, tandis qu’il prenait la main de la jeune fille pour l’embrasser. C’était un peu vieux jeu, mais ça marchait souvent.
« Et… Si je fais ça, tu ne ressens rien ? » S’enquit-il, d’un ton complice.
Il se doutait que cela n’aurait pas ou peu d’effet sur elle. Mais il s’en fichait ; car, à présent, il était revenu à son jeu appelé « pervertissons Nephtys ». Et les premières minutes de ce genre de jeux étaient toujours les meilleures. Il fit doucement glisser ses lèvres sur sa peau, remontant sur son bras. Puis, il se risqua à l’embrasser dans le cou.
« Toujours rien ? » Ricana-t-il, prenant goût à ce véritable défi.
Puisqu’il était miraculeusement arrivé jusque là, où une fille normalement constituée aurait déjà rendu les armes, il poussa le vice jusqu’à l’allonger sur le lit. A quatre pattes au-dessus d’elle, ses bras de chaque côté de la jeune fille pour qu’elle ne puisse pas se dérober, et ricanant seul comme un démon, il susurra alors, d’un ton malicieux :
« Et maintenant… tu ne ressens vraiment rien ? »
Il ricana de nouveau, tant qu’il le pouvait encore ; tant que sa tête était encore sur ses épaules. Il se doutait, vu le risque qu’il venait de prendre en se montrant soudain aussi entreprenant avec elle, qu’elle ne tardait pas à la lui arracher. A moins qu’elle ne s’en prenne à autre chose. Mais bon, c’était pour son bien qu’il faisait cela, après tout. Si elle comptait passer l’éternité sur ce bateau, et qu’elle avait la chance de ne plus avoir à tuer personne, pourquoi ne pas essayer de devenir humaine ? Ca lui ferait au moins un passe temps. De son côté, le jeune homme en avait déjà trouvé un. | |
| | | Nephtys
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Dim 19 Sep - 22:30 | |
| Nephtys ne savait pas vraiment pourquoi elle avait eu ce geste. Voulait-elle réellement effleurer le sentiment humain de ses doigts froids? Voulait-elle vraiment sentir sur sa peau la douce chaleur de la joue de quelqu'un qui laisse s'enflammer ses sentiments? Elle était troublée par la capacité de Kurogane à tantôt laisser éclater ses sentiments, tantôt à les enfermer dans un bouclier impénétrable. Comme s'il y avait deux versions du jeune homme. Mais en même temps, ses réactions n'étaient pas exagérées; pas comme les siennes. La cobaye se souvenait toujours de son saut d'humeur, quand il était entré dans sa chambre. Elle avait détesté ça. Elle espérait vraiment ne plus ressentir un tel choc. C'en était écœurant. Sentir son cœur battre plus vite, ses sens s'affoler, sa raison se brouiller... C'était intolérable. Il allait falloir rehausser tout cela, se forcer à se contrôler. Mais si elle se forçait à se contrôler, qu'était-ce que ce qu'elle était en train de faire, à chercher si la chaleur humaine n'était pas très loin? Mais cherchait-elle seulement de la chaleur humaine, ou bien voulait-elle voir jusqu'à quel point l'être humain pouvait être déstabilisé? Faisait-elle cela uniquement pour troubler le jeune homme? Ou bien désirait-elle réellement ressentir quelque chose, dans cette coquille vide qu'étaient son corps et son esprit? Mais Kurogane ne sembla pas s'embarrasser de tels détails.
Profitant de l'élan de la cobaye, il lui prit la main et y déposa ses lèvres. La cobaye reconnut ce geste comme étant un baise-main, marque de respect envers les dames nobles, à une certaine époque fort lointaine. Elle se demanda vaguement pourquoi il faisait cela. Il n'était pas Lord, et elle encore moins Lady. Mais il sembla s'amuser de sa non-réaction, et remonta le long de son bras, parcourant la peau hyaline de la cobaye, presque souriant. La légère sensation de ses dents sous ses lèves laissaient d'étranges picotements dans les pores de la jeune femme. Elle entr'ouvrit les lèvres, voulant lui demander ce qu'il faisait. Mais elle se retint. Intriguée? Qui sait. Puis, il alla poser sa bouche dans le cou de la cobaye. Nephtys ouvrit de grand yeux. Elle pouvait sentir le souffle chaud de l'assassin tout contre sa peau. Son corps était tellement près du sien... Nephtys avala une gorgée d'air, quelque peu essoufflée. Elle put sentir la fragrance du jeune homme, douce mais forte, encore adolescente. Elle se demanda vaguement pourquoi elle n'en avait jamais, d'odeur. Et pourquoi son propre souffle avait toujours été si froid. Pourquoi son toucher avait toujours été si neutre, pourquoi sa vie n'avait été ponctuée que d'adrénaline provenant de ses trop nombreux combats. Avait-elle un jour raté quelque chose?
Nephtys savait ce qu'était une relation charnelle. On n'avait pas besoin de lui expliquer comment on faisait les bébés, merci. Mais même en étant pertinemment au courant de tout cela, quand il poussa le vice à l'allonger sur le lit, à califourchon au dessus d'elle, elle ne put se retenir d'avaler sa salive. C'était quoi ça? Il fallait analyser, analyser. Supposons que j'ai des sentiments. Soit un homme x appartenant à l'ensemble des hommes pouvant potentiellement me plaire, de par leur physique ou par leur moral. Je ne sais pas qui il est. Soit moi, que je noterai N. Sachant que je n'ai que faire des rapports charnels, que je ne veux pas connaître les autres, et que je n'aime pas les autres par définition, alors pourquoi me pose-je toutes ces questions? Si l'on s'en tient à l'hypothèse, c'est parce que j'ai des sentiments. Il faut alors trouver une autre problématique. Donc nous supposons toujours que j'ai des sentiments. Est-ce que je suis d'accord avec ce qui est en train de se passer? Voyons. Avec x, j'ai échangé quelques paroles, quelques cris, quelques regards. Je me suis laissé à écouter ce qu'il avait à dire ce qu'il voulait sans l'arrêter, même s'il m'a fait bien peur en me disant qu'il avait vu mes yeux.
On peut donc poser deux choses. Si x=Kurogane, quelle est la probabilité pour que l'hypothèse soit confirmée et donc que j'accepte la situation actuelle? Autrement dit, suis-je prête à accepter le fait que je serais douée de sentiments? Si l'on regarde d'un œil objectif toutes ces données, je ne pourrais dire que oui. Et dans le cas, fort peu probable mais existant que je rêve, et bien je pense que je me serais déjà réveillée. Je n'aurais pas pu imaginer tout cela toute seule. Conclusion: je ne suis pas contre cette situation.
Aurais-je alors des sentiments?
Elle regarda le regard profond du jeune homme dont elle ne verrait jamais la belle couleur. Doucement, elle porta la main à son casque, et l'enleva. Elle le posa sur la table de nuit, en prenant garde à ne pas toucher le jeune homme d'un iota. C'était étrange. Les seules fois où elle avait été dans cette situation, c'était à la fin de durs combats où ses adversaires se jetaient sur elle, de désespoir, avec la plupart du temps quelques parties du corps en moins. Et là, elle avait laissé cet homme monter sur elle. Très bien. Elle se releva légèrement, se reposant sur ses coudes pour garder son équilibre.
"Admettons que je puisse ressentir quelque chose."
Elle se pencha, et déposa doucement ses lèvres contre celle de Kurogane.
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| | | Kurogane
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| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Mar 21 Sep - 1:46 | |
| Alors que Nephtys semblait perdue dans des interminables réflexions philosophiques, l’adolescent, au-dessus d’elle, ne disait mot. Il la contemplait, silencieux, avec ce léger sourire de défi aux lèvres. Comme elle ne bougeait toujours pas, il caressa doucement sa joue, et glissa ses doigts dans ses cheveux nacrés. Qu’elle était belle. Dire que cette femme, en réalité, était une arme de destruction massive. Entre ses bras, elle semblait soudain si fragile, si innocente. Quel dommage qu’il ne puisse pas l’avoir. Il avait déjà fait maintes tentatives, et en avait conclu le fait suivant : cette fille ne comprenait rien, ni au langage du corps, ni aux sous entendus qu’il avait pu lui faire… Ou qu’elle puisse faire elle même, sans le vouloir. Le souvenir de la bouteille d’eau était gravé dans sa mémoire. Il ne comprenait même pas, alors qu’il avait osé lui monter dessus, pourquoi elle ne lui avait encore arraché aucun membre de son corps. Cependant… Quelque chose lui disait qu’il avait intérêt à être persistant. Que ses efforts finiraient par payer, et qu’il arriverait bien, même s’il ne la mettait pas dans son lit, à la séduire. Peut-être qu’il découvrirait là un nouveau type de relation, plutôt que ces nuits sans lendemain ou les copines d’une semaine qu’il avait connues à Tokyo. Et il en eût la preuve bien plus rapidement qu’il ne l’aurait songé. Soudain, le prenant au dépourvu, elle l’embrassa sur les lèvres. Kurogane était si surpris qu’il ne fit pas le moindre geste, et se mit à rougir, comme un petit garçon innocent que son amoureuse aurait embrassé sur la joue. Et ce fut lui, cette fois-ci, qui se retrouva en proie à un déluge de questions.
* Elle… Elle m’a embrassé ? Nephtys m’a embrassé ? Sur les lèvres ? * Pensa-t-il, subjugué.
C’était si inattendu, de la part d’une fille aussi coincée qu’elle ! Qu’est-ce que cela voulait dire ? Que devait-il penser, à présent ? Dire que lorsqu’il avait osé la plaquer contre le matelas, il s’attendait à ce qu’elle le jette hors de sa chambre en lui hurlant des menaces et des injures ! Et là… Elle l’embrassait ? Que devait-il faire, à présent ? La considérer comme une fille normale, et, puisqu’elle l’avait provoqué, profiter de la situation ? Mais Nepthys n’était pas une fille normale, après tout. Si elle avait encore des difficultés avec ce type de langage, il était impossible qu’elle ait agi en étant parfaitement consciente de ce qu’elle faisait. Peut-être ne se rendait-elle même pas compte que ce baiser pouvait représenter un accord, un consentement à ce qu’il était en train de faire. Kurogane se mordit les lèvres. De toute sa vie, jamais une fille ne lui avait posé un tel problème, un tel conflit entre sa conscience et ses désirs. Que faire ? Que faire ? L’air songeur, il se pencha sur elle, et arrêta son visage juste à quelques millimètres du sien, comme s’il allait l’embrasser à son tour. Devait-il poursuivre ? C’était si facile. Elle était tout à lui. Sous son emprise. Piégée entre lui et le matelas, sans possibilité de se dérober. Une belle pomme rouge qu’il n’avait plus qu’à cueillir et dévorer. Non. Elle n’était pas encore mûre. Pas maintenant, alors qu’elle ne saurait même pas, lorsqu’il l’embrasserait, apprécier ce baiser à sa juste valeur. Cette pensée le tuait, mais il fallait attendre, le temps qu’elle s’épanouisse un peu plus. Qu’elle commence à « ressentir » comme il se devait. Sinon, il n’aurait aucun mérite, ni aucun plaisir à la prendre. Il pensait exactement comme le Vicompte de Valmont face à Madame de Tourvel. Il voulait que se soit sa victime elle-même qui se jette dans ses bras, malgré elle, malgré sa pudeur, malgré son innocence. Il voulait la voir se pâmer de plaisir, se courber sous ses caresses, crier son nom comme les autres ne l’avaient jamais fait. Il la voulait tout entière, dévouée, et pour lui seul. Poussant un petit soupir, Kuro brisa finalement le silence en murmurant, d’un ton amusé :
« Bon… Je crois, ma petite Nephtys, que tu as eu assez d’émotions pour l’instant. Nous reprendrons plus tard… Au moment venu. »
A ces mots, un petit rire sournois s’échappa de ses lèvres ; il l’embrassa sur la joue, et, avec un léger sourire, il se rassit sur le lit, lui rendant sa liberté. Puis, il se leva complètement, et se dirigea vers la porte. Il ne pouvait plus rester dans cette pièce, avec elle. Au beau milieu de la cabine, se disant qu’il ne pouvait tout de même pas partir sans lui donner des explications, il s’arrêta et lança, d’un ton complice, tournant sa tête vers elle :
« Je meurs de chaud. Je vais prendre une bonne douche glacée. Je reviens te voir plus tard… D’accord ? »
Il la gratifia d’un clin d’œil malicieux.
« A plus tard, ma belle Nepthys. Il me tarde déjà de te revoir. »
Sur ce, et sans plus d’explications, il sortit de la chambre, referma la porte derrière lui, et s’appuya dessus. Il poussa un long soupir d’exaspération. Même s’il avait voulu donner l’impression qu’il sortait parfaitement indemne de cette expérience et était totalement maître de la situation, au fond, il se mourait de rage contre lui même. Pourquoi ? Pourquoi avait-il abandonné à l’instant précis où il aurait enfin pu l’avoir, après avoir tant attendu ? Pourquoi est-ce qu’il était sorti, alors qu’il mourait d’envie de retourner dans cette sombre pièce ? Kurogane passa sa main sur ses yeux, et massa doucement ses paupières pour se relaxer. Peut-être qu’il n’avait pas envie, pour une fois, que cela se termine aussi facilement que d’habitude. Peut être qu’il en voulait plus, cette fois-ci. Oh, et puis, pourquoi s’embêter avec des questions existentielles ? Il s’en fichait, de sa propre psychologie profonde. Tout ce qui comptait, à présent, c’est que maintenant qu’il avait laissé passer l’occasion cette fois-ci, il ne faudrait pas manquer la prochaine. Et surtout, qu’il avait vraiment besoin de cette douche froide. Très froide. Il pressa soudain sa paume contre son front : il était brûlant.
* Mais qu’est-ce que j’ai, là ? * Pensa-t-il, déboussolé. * Pourquoi est-ce que j’ai si chaud ? Je suis sorti pourtant, non ? Elle n’est plus en dessous de moi. Je ne devrais même plus y penser, à l’heure qu’il est… Alors pourquoi… *
Pourquoi est-ce qu’il ne pouvait pas s’empêcher de repenser à son si beau visage gracile au dessous de lui ? A ces perles d’eau brillantes sur sa gorge et ses cheveux, lorsqu’elle s’était vidée cette bouteille d’eau sur le corps ? A ces yeux gris pâle qu’il n’avait aperçu que pendant un très court instant ? L’adolescent, fiévreux, parcourut les couloirs de la Nef à la hâte, pour s’engouffrer dans les bains. Une fois dans le vestiaire, il se débarrassa de ses vêtements, et se précipita sous la douche. Il ouvrit le robinet d’eau froide à fond, et poussa un cri de dégoût lorsque l’eau gelée mordit sa peau. C’était la première fois qu’une fille lui faisait tant d’effet. Et c’était peut-être pour cela que, pour la première fois de sa vie, il n’arrivait pas à s’en remettre. En proie aux gouttes d’eau qui transperçaient sa peau telles des poignards glacés, Kuro détourna son regard vers le petit miroir accroché sur le mur près de lui. Depuis tout à l’heure, son visage était rouge. A cette vue, il ne rougit que plus. Mais qu’est-ce qui lui prenait, à la fin ?! Profondément troublé, il stoppa l’eau, saisit une serviette dans laquelle il s’enveloppa, et retourna au vestiaire, étourdi par cette émotion inconnue qui le prenait, et par le froid qui avait endormi ses muscles. Les paroles de Time is Running Out lui revinrent à l’esprit. « You will be the death of me » Lentement, l’adolescent se rhabilla, et marcha jusqu’à sa chambre, manquant de se casser la figure à plusieurs reprises. Une fois là-bas, il s’enferma à double tour, se réfugia sous sa couette, et n’en sortit plus. Mais qu’est-ce que c’était que cet horrible sentiment ? Il ne voulait même pas le savoir. | |
| | | Nephtys
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La vie d'avant... Date de Naissance: 4 avril 2047 Âge du Personnage: 24 ans Lieu de Naissance: USA
| Sujet: Re: Shit. Just wanted to be alone [Kuro] Dim 26 Sep - 22:43 | |
| Elle détacha bien rapidement ses lèvres de celles de Kurogane. Il ne semblait pas avoir répondu à son baiser, mais elle n'en avait franchement que faire. Tout ce qui importait pour le moment, c'était la sensation que cela lui avait procuré. Et pour ça, il fallait être franche. Elle n'avait rien ressenti du tout, à part le léger frisson de sentir sa peau entrer en contact avec quelqu'un d'autre. Elle n'avait pas eu le cœur battant plus fort, pas eu de joie ni de peine, rien, rien du tout. Comme si ce vaporeux baiser n'avait été qu'un pas dans une profonde couche de neige dure. Rien, rien. Et quand le jeune homme se pencha à nouveau vers elle, son visage se ferma. Leurs visages se fermèrent; devrions-nous dire. Nephtys savait que c'était bien assez; et Kurogane aussi. Certainement pas pour les mêmes raisons; on peut trouver une raison à tout. Mais là, Nephtys ne trouvait pas de raison de continuer ce qu'ils étaient en train de faire. Il n'y avait aucune raison à ce qu'ils étaient en train de faire. Et le fameux entraînement que Kurogane lui avait promis lui semblait bien piètre et plat. Elle s'était presque attendu à une révélation, mais n'avait eu qu'une démonstration de plus de l'appétit humain pour la chair. Cependant, là, à présent, il semblait parfaitement se contenir. Comme s'il en avait assez. Assez de quoi? L'avait-elle frustré? Franchement, elle n'en avait rien à faire.
Ce devait être autre chose que de la frustration. De l'attente, peut-être. Il désirait certainement faire durer l'instant. Mais alors pourquoi ne faisait-il rien? Il semblait songeur. Mais cela, Nephtys ne pouvait pas en être certaine, puisqu'elle ne se basait que sur ses ressentis de l'aura de Kurogane. Sans son casque, et surtout dans l'obscurité, elle était parfaitement aveugle. Elle ne pouvait qu'essayer de comprendre, elle ne pouvait qu'essayer d'imaginer ce qui était en train d'arriver, ce qui allait arriver. De nombreuses idées montaient à son esprit, mais aucune ne la satisfaisait. Elle finit par décider que le jeune homme en avait assez d'elle, et qu'il allait sûrement s'en aller. Elle n'en avait cure. Elle avait besoin de repos. Et de réflexion. Ce fut alors à ce moment que Kurogane se releva, se détacha du lit de la cobaye, décidant que c'était suffisant. Nephtys ne regarda même pas dans sa direction; répondant encore moins. Elle se fichait un peu qu'il s'en aille, de toute manière il n'avait pas réussi à faire grand chose, à part la mettre en colère pour ses yeux, parler avec elle et lui arracher quelques frissons purement nerveux. Mais, à ben y penser, cela faisait quand même pas mal de choses tout ça... Non? Il continua de parler, s'étirant, se dirigeant vers la porte de la cobaye. Elle ne vit pas vraiment tout ce qu'il fit, et ferma les yeux violemment alors qu'il ouvrait la porte, pour ne pas apercevoir la lumière et ne pas se blesser.
"Oui, j'ai bien envie de voir si tu réussiras à m'arracher autre chose que quelques mots et des effleurements, la prochaine fois. Bonne douche. Ferme bien la porte en sortant s'il te plaît."
Elle savait très bien qu'elle n'avait répondu très agréablement; elle en était même consciente. Mais là, elle n'avait plus envie d'être polie, n'avait plus envie de répondre à qui que ce soit. La porte se ferma doucement, et elle ne l'entendit pas partir. Peut-être s'attendait-il à ce qu'elle rouvre la porte pour se jeter dans ses bras? Pff, petit prétentieux. Elle récupéra son casque sur la table de nuit et s'assit sur son lit, posément. Par curiosité, elle activa les rayons X de son casque, et observa la silhouette prostrée du jeune homme, toujours adossé à sa porte. Elle se leva et contourna la porte, pour comprendre les mouvements de l'adolescent japonais. Il semblait en proie à un trouble quelconque. Pourquoi? A cause d'elle? Il n'y avait vraiment pas de quoi. Encore, elle aurait été une femme aussi intéressante que voluptueuse, avec de la conversation et des hormones à en revendre, elle aurait compris, mais là... Pourquoi se mettait-il dans un état pareil pour elle? Elle, cobaye, coquille vide parfaitement consciente de ce qu'elle était? Peut-être n'aurait-elle pas dû jouer avec le feu. Elle n'allait pas parvenir à devenir une humaine normale; elle n'aurait jamais les sentiments dont tous ces humains se pâment; elle serait juste là, pâle copie, tentant de comprendre et d'analyser les sentiments qui la submergeraient sans en comprendre le sens. C'en était presque triste, mais c'était ainsi.
Elle vit enfin l'assassin s'éclipser en direction des douches. Elle remit la vision infrarouge de son casque, et décida de ne plus penser à sa conversation avec Kurogane. Qu'y avait-elle gagné? Une preuve qu'elle pouvait ressentir quelque chose? Mais en soit, c'était très significatif. C'était certainement un petit pas pour accéder aux sentiments humains. Et ainsi, petit pas par petit pas, elle atteindrait enfin une couche nerveuse et sensible acceptable. C'était possible, théoriquement, vu qu'elle avait un ADN parfaitement humain. Elle n'était devenue froide que par sa vocation et son éducation. Et aussi à cause de sa croissance accélérée. Elle n'avait pas eu d'enfance, pas eu d'amour, pas eu d'amis. Comment pouvait-elle alors le besoin charnel et émotionnel des êtres humains de s'aimer, de s'apprécier, de s'accoupler ou même de se haïr? Non, Nephtys ne comprenait pas, et doutait de comprendre un jour. Elle se demanda vaguement à quoi pouvait ressembler le rouge des yeux de Kurogane. Elle s'interrogea aussi sur sa propre couleur d'yeux. Couleur lune, ce n'est pas commun? Son père lui avait dit autrefois que ses yeux étaient bleu pâle. Peut-être changeaient-ils de couleur selon ses ressentis. Mais alors, si quand elle était froide ils étaient bleus, les sentiments peu éveillés ils étaient gris, allaient-ils changer de couleur si ses sentiments évoluaient encore? Elle n'en savait rien, n'était pas certaine de vouloir savoir. Pour l'instant, elle décida de faire ce à quoi elle s'adonnait quand Kurogane l'avait interrompue: dormir. Dormir de tout son soûl et ne plus penser à rien.
En jetant un coup d'œil par terre, elle maugréa. Il n'avait même pas pris le livre.
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